Dépasser les blocages : des freins à l’installation, et des solutions
Financer son projet
Une diversité d’aides à la formation et à l’installation existe, s’y retrouver pour financer son projet n’est pas aisé car elles évoluent beaucoup. C’est une difficulté que Léa Cabal Zinck met en avant, « On vous dit parfois que vous avez droit à 50% d’aides, mais quand le dossier est déposé, ça peut changer, et vous n’avez droit qu’à 40% » Même en étant éligible aux aides et en ayant formulé les demandes, il n’est pas évident de gérer les délais entre le dépôt du dossier et la réception des fonds.
Il est important de travailler à la formulation de son projet pour pouvoir présenter des objectifs durables. Nicolas Rozier, en formulant son projet via un budget prévisionnel, a réalisé qu’acquérir un terrain, son projet initial, risquait d’être compliqué, malgré l’apport personnel qu’il avait prévu et de potentiels prêts. A ce sujet, il met en avant le fait qu’un projet évolue toujours, que les contraintes financières sont un frein. Cependant, il a pu remodeler son projet pour s’orienter vers le fermage, situation qui lui convient finalement bien. Son parcours montre cependant que tout blocage financier n’est pas un frein insurmontable, que des solutions existent si l’on sait se montrer patient, que l’on multiplie les sources d’informations et que l’on s’appuie sur la diversité des interlocuteurs présents sur un territoire.
« Quand on arrive du jour au lendemain auprès d’un banquier avec un projet de micro ferme en permaculture, des mots qui font un peu peur, ça rebute […] quand les organismes en face de vous voient concrètement que vous avez pris le temps de vous former, de faire votre expérience et qu’il y a vraiment une recherche sérieuse derrière, ça crée le lien de confiance. »
Nicolas Rozier
Le foncier
L’accès aux terres agricoles est un frein important pour de nombreuses personnes, il existe cependant un panel de solutions. Par exemple, Nino Fillos a pu s’installer sur les terres d’un agriculteur qu’il connaissait, et avec qui il avait déjà travaillé. Tous deux ont choisi de s’associer via un GAEC. Cependant, suite au décès d’un des propriétaires, une partie des terres leur a été retirée, l’héritier souhaitant les utiliser pour agrandir son exploitation, en agriculture conventionnelle, alors qu’Alain et Nino cultivent en agriculture biologique. Se voyant infliger des pénalités, Nino Fillos et son associé ont cherché à sécuriser leurs terres pour se protéger d’une telle situation. Pour cela, ils se sont rapprochés de la SAFER ainsi que de l’association Terre de Liens. Les deux structures ont alors combiné leurs actions pour racheter leurs terres, permettant à Nino et Alain de maintenir leur système de production en devenant locataires par le biais d’un bail rural environnemental avec Terre de Liens.
Pour Léa et Ghislain, désormais associés à Nino, le paiement d’un fermage à Terre de Liens leur a évité de devoir acheter la ferme au cédant, ce dont ils n’avaient pas les moyens. Terre de Liens a ainsi facilité leur installation agricole.
L’accès au foncier est un élément qui détermine la trajectoire de chacun. Par exemple, de son côté, Joannes Boullon a défini sa production en fonction de cette contrainte. En choisissant l’apiculture, il était en capacité de démarrer son activité sans avoir de terres et en limitant ses investissements. C’est aussi le cas de Frédéric Roger, qui, faisant face à différentes difficultés pour s’installer en collectif, s’est dirigé vers l’espace-test agricole.
S’entourer : le soutien de structures d’accompagnement
et de réseaux à long-terme
L’installation n’est pas une fin en soi, c’est pourquoi des structures locales proposent un accompagnement sur le long terme. Elles font largement partie du quotidien des paysans que nous avons rencontrés. Grâce à ces structures, les porteurs de projet se rencontrent lors de différentes formations, dispositifs d’accompagnement et construisent un entourage qui, même une fois installés, devient une importante source d’échanges et d’entraide entre paysans. C’est notamment le cas de Joannes Boulon qui, grâce à l’ADEAR, maintient un lien avec ses pairs. Frédéric Roger bénéficie quant à lui du cadre de la coopérative d’activités, qui lui permet d’être entouré au quotidien. Grâce à celui-ci, il dispose d’appui, de conseils et d’un soutien essentiel.
Dans le cas de Vivien Sabot, Nino Fillos, Léa Cabal Zinck, et Joris Auger, ce sont plutôt les filières de commercialisation et réseaux de paysans à proximité qui constituent des points de contact et leur permettent de former un réseau. A ce sujet, Léa et son compagnon Ghislain, qui souhaitaient, avec leur reconversion, s’inscrire dans un territoire, se sentent aujourd’hui très intégrés. Par le biais de la vente de pain, mais aussi avec Terre de Liens, ils sont entourés et insérés sur leur territoire. Ghislain est d’ailleurs élu sur la commune de leur installation !